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Le modèle de santé finlandais


Le système d’assurance maladie finlandais a connu une série de réformes axées sur la décentralisation, la modernisation et la responsabilité financière des malades qui se sont globalement avérées fructueuses. Les dépenses de santé sont contenues du fait de la participation financière des patients qui est assez élevée. Les finlandais sont majoritairement satisfaits de leur système de santé bien que celui-ci présente certaines faiblesses en termes de files d’attentes et d’inégalités d’accès aux soins.


 

Un service public de santé décentralisé et financé par l'impôt


Les services de santé sont fournis principalement par le secteur public et financés par l’impôt. Les municipalités sont responsables de l’essentiel du financement et de la prestation des soins de santé publics. Il existe des services privés, essentiellement pour les soins primaires, moyennant une participation financière des patients beaucoup plus élevée que dans le secteur public. Par ailleurs, la médecine du travail donne aux salariés un large accès gratuit aux soins primaires. Le financement s’appuie sur des systèmes parallèles qui associent impôt et assurance maladie nationale obligatoire (KELA), complétés par le ticket modérateur.


Le régime d’assurance maladie finlandais est financé, pour 35% par les impôts locaux, dont une partie importante repose sur une taxation du revenu. Les autres sources de financement public sont constituées par des subventions de l’Etat (25%) et l’agence nationale de sécurité sociale Kela (15%), qui est elle-même essentiellement financée par des cotisations sociales des employeurs (pour 29,6%) et des salariés (pour 31,4%) et une subvention de l’Etat (22,5%). La contribution nette des ménages est de 20% et celle des assurances privées de 5%.

Les services sanitaires sont les plus importants et les plus lourds à gérer parmi ceux dispensés par les municipalités. Celles-ci assurent, à travers les 270 centres de santé locaux, de nombreuses prestations, telles que les consultation médicales, l’assistance médicale aux personnes âgées, les soins dentaires, ou la santé scolaire. Les centres de santé sont, selon les cas, détenus et gérés par une ou plusieurs municipalités, elles-mêmes regroupées en 20 districts. Lorsque la maladie du patient exige une opération particulière, les centres de soins renvoient les patients vers les structures hospitalières adaptées, qu’elles soient spécialisées ou générales. Ces centres constituent la seule solution disponible pour les personnes économiquement défavorisées et les chômeurs qui n’ont pas accès à la médecine du travail.



La gestion des hôpitaux qui relève également, directement des municipalités et des districts a été largement rationalisée au cours de la dernière décennie: distinction entre les structures à caractère général et les établissements spécialisés; adaptation de la carte hospitalière aux besoins; application des méthodes de management privé, à des fins d’efficacité; renforcement de l’autonomie de gestion dans le cadre d’une négociation annuelle sur les services et les prix avec les municipalités. Sur les 441 000 employés des collectivités locales, 30,8% travaillent dans le secteur de la santé. Les services de santé sont donc principalement financés par la redistribution de l’impôt sur le revenu et les subventions gouvernementales. La contribution du budget de l’Etat aux municipalités est calculée sur la base d’indices démographiques : population, structure d’âge, taux de mortalité. Dans tous les cas, les patients contribuent à l’acte médical dans la limite de trois actes dans l’année, au-delà desquels les prestations sont gratuites.


 

Une assurance de santé privé et obligatoire


Tout résident permanent en Finlande doit souscrire à une assurance-maladie obligatoire, financée par les taxes locales et par un prélèvement à la source du revenu. L'institution Kela est chargée de gérer cette assurance sociale.


Ainsi, quand le patient fait appel au secteur privé, cette assurance maladie prend en charge une partie des frais de consultation et de médicaments. Le remboursement des médicaments par Kela dépend alors de la catégorie dans laquelle celui-ci est enregistré auprès de l'Agence Nationale du Médicament (FIMEA).


 


Les réformes des années 90 entre décentralisation et responsabilisation du patients.



Le régime d’assurance maladie finlandais a fait l’objet d’une réforme au début des années 90, la gestion et le financement des services publics sociaux et de santé (y compris hospitalier) ont été transférés aux 336 municipalités.



  • La décentralisation a certes renforcé la contribution financière des usagers d’une municipalités à l’autre mais les frais maximum sont encadrés au niveau national.


Depuis la réforme de 1993, les collectivités locales déjà très décentralisées ont le droit de négocier le prix et d'acheter librement les services de soins avec les établissements hospitaliers pour les assurés sociaux. L'allocation financière, au titre d'assurance maladie, du niveau central vers les collectivités locales s'effectue au début de l'exercice, évitant ainsi d'établir un lien avec les dépenses effectivement supportées. Le développement du secteur privé se traduit par la création de nouveaux centres de santé ou d'hôpitaux, ainsi que par celle de sociétés privées d'intérim pour les médecins. Si les prestations sont plus coûteuses pour les malades, elles sont aussi plus rapides et obéissent néanmoins aux règles sanitaires fixées par l'Etat. Enfin, de nouvelles structures sont cofinancées par le public et le privé et de nombreux médecins travaillent à la fois pour le secteur public et privé.

La décentralisation des services de santé opérée au début des années 90 a été doublée d’un renforcement de la contribution financière des usagers. Depuis 1993, les centres de santé sont payants, à l’exception des enfants de moins de 15 ans. Auparavant, les centres de santé offraient gratuitement leurs services.



Les patients supportent désormais une partie du coût des soins. Leur contribution varie en fonction de leur municipalité de résidence. Le patient a le choix entre un abonnement forfaitaire (de l'ordre de 27,50 euros par an), lui permettant de bénéficier de consultations gratuites, et le paiement de chaque consultation à 13,80 euros), avec des frais maximum de 41,40 euros (soit trois consultations). A noter que le prix d’une simple consultation est de 18,90 durant les horaires de nuit (20h-8h), les samedi et dimanche ainsi que les jours fériés. Le rendez-vous manqué sans avertir à l'avance est facturé 33,90 euros. Les soins offerts par les centres privés ne sont remboursés par la sécurité sociale qu'à hauteur d'environ un tiers.



Quant aux hôpitaux, les soins y sont payants et varient d’une municipalité à l’autre dans la limite des frais maximum, qui sont notamment de 27,50 euros pour une consultation, 90,30 euros pour la chirurgie de jour, 32,60 euros pour le forfait hospitalier et de 15,10 euros pour un lit d’hôpital (hôpital psychiatrique compris). Pour une série de traitements qui comprennent la dialyse, la radiothérapie, la chimiothérapie et la réadaptation médicale, le montant maximum de paiement est 7,50 euros par traitement payable au maximum 45 fois. Ces soins sont toujours gratuits pour les jeunes de moins de 18 ans. En ce qui concerne les traitements de réhabilitation à destination des personnes handicapées le montant maximum chargé est de 11.30 euros par jour de traitement.



Enfin, les médicaments sont généralement remboursés à 50 % pour la part dépassant 8 ou 10 euros par médicament prescrit, ce taux de remboursement pouvant atteindre 75 ou 100 % pour les malades souffrant de pathologies chroniques.

Cette participation des patients est cependant plafonnée à 670 euros par an, seuil au-delà duquel les médicaments sont pris en charge à 100 %.

 

Les réforme de 2000 et 2004 : les plafonds maximums dans le but de corriger les excès de la réforme des années 90




Les centres de santé offrent un large accès aux soins, étant donné qu’ils ne font payer aux usagers que des honoraires modiques représentant 8,9% du cout total, en moyenne (2009) et que les plafonds annuels appliqués aux paiements directs protègent les clients contre les dépenses catastrophiques.

Depuis 2000, les patients bénéficient d’un plafond maximal annuel (fixé tous les deux ans) des dépenses de santé à leur charge. Un plafond à hauteur de 636 euros couvre les soins de santé délivrés par le secteur public. Au-delà des 636 euros les soins sont gratuits. seuls les soins institutionnels[1] restent à la charge du patient : 15,10 euros. Chacun est tenu de veiller de manière autonome à ses dépenses. Les centres de santé délivrent, en effet, une carte de suivi des paiements effectués et les reçus doivent être conservés. Une fois le plafond atteint, le centre médical ou autre prestataire de la santé publique délivre une attestation. Les dépenses de santé des mineurs sont calculées de manière commune avec celles de leurs parents. Ce plafond maximal, ne comprend pas : les soins dentaires, les transports sanitaires, les attestations (certificats) médecins ainsi que les ordonnances établies par les médecins privés pour faire des radios, etc.

Il existe également depuis cette loi de 2000, deux plafonds fixés par KELA pour ce qui concerne les soins délivrés par le secteur privé de 242,25 euros pour les dépenses de transport (disparité du territoire finlandais) et de 670 euros pour les dépenses de médicaments. Au-delà, de ce montant, le patient doit s'acquitter d'un ticket modérateur de 1,50 euros par médicaments. Avant d’atteindre ce plafond notifié par KELA, les pharmacies déduisent la différence. Une fois le plafond atteint, pour bénéficier du prix du ticket modérateur (1,50 euros) le client doit montrer la carte KELA ainsi que la notification de KELA du droit à percevoir cette indemnisation.

Une loi sur les coupons de service pour les soins à domicile applicable depuis le 1er janvier 2004, permet aux personnes âgées de bénéficier de services privés grâce à un coupon, sans avoir besoin de demander un remboursement.


 

Un système jusque-là satisfaisant en proie aux défis du vieillissement et de la hausse des inégalités régionales et socio-économiques



Il n’existe pas d’études d’impacts à proprement parlé sur ces réformes. Cependant, une série d’indicateurs peuvent globalement attester de l’efficacité de ces réformes.

La population finlandaise est globalement satisfaite du système de santé. Une étude réalisée en 2009 pour la Commission européenne a montré que 94% des personnes interrogées estimaient que la qualité générale des soins de santé en Finlande était bonne, une proportion dépassée seulement en Autriche et en Belgique. L’enquête N°283 de l’Eurobaromètre (2007) montre que les finlandais sont très satisfaits de l’accès aux soins et de leur accessibilité économique (notamment pour les spécialistes).


Le régime d’assurance maladie permet à la Finlande d’avoir une situation de santé parmi les plus favorables des pays de l’OCDE. Selon divers indicateurs, la santé de la population finlandaise s’est considérablement améliorée au cours des dernières décennies. La mortalité cardiovasculaire a été divisé par 3 au cours des 25 dernières années.

Enfin, on observe une bonne maitrise des dépenses publiques de santé qui représentent 8,9% du PIB (16 milliards d’euros) en 2010 contre 11,6% pour la France et 9,5% pour la moyenne des pays de l’OCDE. En revanche, La dépense de santé par personne a fortement progressé depuis 2001, +70% contre 42% pour la France.


Alors que la Finlande a réussi à contenir les dépenses de santé mieux que dans d’autres pays de l’OCDE, le cout croissant de technologies médicales onéreuses, les exigences grandissantes de patients ainsi que le vieillissement de la population mettront les ressources du secteur à rude épreuve. Les projections du ministère de la Santé et des Affaires sociales indiquent une forte progression des dépenses publiques pour les soins de santé et les traitements de longue durée au cours des prochaines décennies. D’après, les projections du ministère sur la base de la structure actuelle de consommation de soins, les dépenses publiques passeraient de 8,9% du PIB actuel à 11% en 2050. Il faudra donc augmenter les impôts ou restreindre l’offre des services publics.



La fragmentation de la prestation de services de santé est une source d’inefficience, à laquelle le gouvernement a l’intention de s’attaquer au moyen de réformes et de fusions au niveau des communes. Le gouvernement élabore déjà une réforme qui entrera en vigueur le 1er mai 2013 sur la restructuration de l’offre des soins. Les petites communes ont souvent du mal à offrir des soins médicaux adéquats, notamment à cause des difficultés qu’elles rencontrent pour embaucher du personnel qualifié. Les fusions de communes réalisées jusqu’à présent n’ont pas permis d’obtenir les gains de productivité escomptés, et les réformes prévues doivent par conséquent s’accompagner d’une prestation de services plus regroupée afin d’atteindre les objectifs souhaités en réalisant des économies d’échelles.


Enfin, les inégalités en matière de santé entre les grandes catégories socio-économiques et les régions sont importantes en Finlande. Selon l’OCDE, l’inégalité d’accès à un médecin généraliste ou à un spécialiste en fonction des revenus est parmi les plus marquées de l’OCDE. Ces inégalités découleraient de la fragmentation du système de santé finlandais, dans lequel les petites municipalités ont du mal à subvenir aux besoins de santé de leur population mais il est fort possible que les mécanismes de responsabilisation financière des patients ait accentué ce phénomène.




[1] souffrance psychique et troubles psychopathologiques

 
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