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Il est urgent d’agir pour la transition écologique du système de santé




Le secteur de la santé doit prendre ses responsabilités vis-à-vis de son empreinte climatique. Il doit répondre à l’urgence climatique, en étant capable de traiter ceux qui sont malades à cause de la crise climatique et de ses conséquences, mais aussi en réduisant drastiquement ses propres émissions.

 

Les enjeux de santé et de climat sont intrinsèquement liés de deux manières. D’abord parce que le système de santé est à l’origine d’atteinte à l’environnement. A l’instar des autres grands domaines industriels, la santé constitue un secteur fortement consommateur de ressources matérielles et énergétiques provoquant ainsi des émissions de gaz à effet de serre.

 

Ensuite, parce que la dégradation de l’environnement et le changement climatique affectent la santé des personnes alourdissant ainsi les dépenses de santé. On sait déjà qu’une grande partie des pathologies chroniques est lié aux facteurs environnementaux. L’OMS indique qu’un quart des maladies chroniques dans le monde peuvent être imputées à des facteurs environnementaux (qualité de l’air et de l’eau, déchets, réchauffement climatique).

 

Cette pression sur les systèmes de santé accroit les besoins en ressources énergétiques des systèmes de santé. Autrement dit, si on ne fait rien le dérèglement du climat génère davantage de besoins de santé lesquels pèsent sur la consommation de soins et augmentent mécaniquement l’empreinte carbone du secteur de santé. C’est pourquoi il nous faut intégrer les enjeux de décarbonation du système de santé si l’on veut sortir de ce cercle vicieux.

 

D’autant plus, que la transition écologique représente également un des grands enjeux de santé publique pour améliorer la santé globale des personnes.


Évaluer pour pouvoir agir au bon endroit

 

 

Cependant avant d’agir, il nous faut savoir évaluer l’empreinte carbone et c’est là que l’affaire se corse.

 

Les travaux du Shift Project[1] permettent d’évaluer l’empreinte carbone du système de santé en France.  Même si les conséquences du changement climatique sur la santé sont assez bien connues, rares sont les analyses traitant de l’effet du secteur de la santé sur le changement climatique lui-même.  Car, même si le secteur de la Santé représente 2,6 millions d’emplois soit 9% de la population active, cet effet est loin d’être négligeable puisque ses émissions de GES représentent autour de 49 millions de tonnes de CO2e, soit plus de 8 % de l’empreinte carbone de la France. Plus de 85% de ces émissions sont dites « indirectes » et proviennent, pour la moitié d’entre elles, des médicaments et des dispositifs médicaux.

 

Les achats de médicaments représentent 29% des émissions de CO2 suivi des achats de dispositif médicaux avec 21%. Ensuite, l’alimentation et les transports des usagers et visiteurs représente respectivement 11% et 9% des émissions de CO2. Les émissions dites « directes » liée au fait de chauffer les bâtiments (9%) et à la consommation de gaz médicaux et climatisation (2%) sont finalement peu élevées par rapport aux émissions directes.

 

Faire un diagnostic carbone permet donc d’adresser les responsabilités et d’établir des leviers d’actions.

 

Agir sur les sources d’émissions directes : transports, alimentation, immobilier  

 

 

La feuille de route du Shift Project présente différents leviers d’action qui vont de la stratégie du refroidissement des établissements de santé par la mise en œuvre de la bio climatisation à la réduction du gaspillage alimentaire dans les hôpitaux ou maisons de retraite.

 

En termes de déplacement, l’électrification massive du parc automobile et le développement de transports sanitaires électriques constituent un levier important.  Le Royaume-Uni s’est lancé dans récemment dans les ambulances à hydrogène. L’Assurance maladie a choisi une autre voix tout aussi intéressante, celle du transport partagé qui permet de mutualiser les trajets entre patients.

 

Les produits de santé sont également émetteurs de gaz à effet de serre. La réduction des gaz médicaux anesthésiants est aussi une source important de réduction des gaz à effets de serre. Le National Health Services (le système de santé anglais) s’est attelé à cette tâche depuis un certain nombre d’année est à su trouver des substituts décarbonés.

 

Les hôpitaux qui sont très consommateurs de plastiques et de matériaux jetables pourraient entamer une réflexion de fond autour de la règle des 5R pour les achats durables :

 

-           R1 : Réduire : Puis je me passer de ce produit ?

-           R2 : Retraiter : Puis je acheter du retraité ou reconditionné ?

-           R3 : Recycler : Le produit est-il recyclable ?

-           R4 : Réutiliser : Puis je choisir du réutilisable plutôt que de l’usage unique ?

-           R5 : Renouvelable : Quels matériaux composent le produit ?

 

 

mais aussi les émissions indirectes dominées par l’achat de médicaments

 

Le médicament à une empreinte carbone conséquente car la production industrielle se fait en majeure partie à l’étranger.  Par ailleurs, les chaînes de production industrielle peuvent être séquencées dans différents pays impliquant de nombreux transports internationaux intermédiaires. C’est pourquoi la relocalisation de la production de médicaments et de la fabrication du principe actif est un levier important de réduction de l’empreinte énergétique.

 

Les pouvoirs publics pourraient agir sur ces émissions indirectes liés à la production de médicament qu’ils ne contrôlent pas directement en influençant la chaine d’approvisionnement. L’exemple britannique est éclairant, en effet, le NHS, le système de la santé publique du Royaume-Uni fait participer ses fournisseurs à son programme « zéro émission ». Pour se qualifier pour un contrat avec le NHS, le fournisseur doit avoir publié un plan de réduction carbone sur ses émissions alignées sur les exigences de décarbonation du système de santé britannique.

 

 

La réduction des médicaments inutiles et gaspillés est également un levier important de décarbonation. En France, on consomme 2 fois plus d’antibiotiques et 14 fois plus d’anxiolytiques par rapport à l’Allemagne. Ce mode de consommation doit être fortement réinterrogé. En France, on sort du médecin généraliste dans 90% des cas avec une prescription médicamenteuse contre 72% des cas en Allemagne et 42% aux Pays-Bas. La sobriété des prescriptions est donc une problématique à creuser pour le cas français. 

 

 

La prévention : un cercle vertueux entre santé et écologie

 

Enfin, il faut agir en amont sur les déterminants de santé par le biais de la prévention. Il est en effet possible d’agir sur la santé des assurés avant le besoin de soins. C’est pourquoi le développement des politiques de prévention qui agissent sur les déterminants de santé comme l’alimentation, l’activité physique sont un moyen d’améliorer la santé des personnes et de décarboner le système de santé. Un exemple souvent repris concerne les déplacements quotidiens à vélo qui produit des bénéfices sur la santé de la personne qui se déplace (cardio-vasculaires, bien-être, etc.) et sur les émissions de gaz à effet de serre.  Investir massivement dans ce domaine permet d’améliorer la pertinence des soins et de faire des économies de long-termes.

 

 

Les marges de manœuvre pour réduire ces émissions sont nombreuses. Elles doivent être fondées sur la science et nécessitent l’engagement des l’ensemble des parties prenantes au système de santé. L’effort de sobriété doit être bien répartie c’est un enjeu  d’adhésion des acteurs et des citoyens. La transition écologique doit peser à la fois :

-          Sur la demande avec la réduction de la consommation des assurés),

-          Sur l’évolution épidémiologique de la population (moins de maladies chroniques)

-          Sur l’industrie (conditionnement, relocalisation, sobriété). 

 

Les assurés doivent également être intégrés au moment de l’élaboration des stratégies de décarbonation pour ne pas nuire à la qualité des prises en charge et permettre l’appropriation « des bon usages ».

 

De leur côté, les professionnels de santé doivent pouvoir vérifier sa trajectoire de réduction des émissions de carbone. Il faut donner de la visibilité aux équipes qui veulent agir et leur montrer sur ce quoi elles peuvent agir.

 

Il est urgent d’agir ! Ce mouvement de décarbonation est protéiforme c’est pourquoi il faut uniformiser les méthodes pour mieux évaluer les impacts de ces politiques de décarbonation.


[1] Rapport Décarboner la Santé pour soigner durablement. Publié initialement en novembre 2021



Pour aller plus loin:




 

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